Ce que je recherche dans mes lectures
L'envie de lire correspond chez moi à un besoin viscéral. Peu importe combien de fois dans ma vie j'ai déjà pris dans mes mains un livre tout neuf (ou tout ancien, un de ces magnifiques volumes aux feuilles jaunies déniché dans une bibliothèque ou chez un bouquiniste), les battements de mon coeur s'accélèrent toujours un peu. Sur la photo au-dessus on voit deux romans de Nicolas Barreau que j'ai lus récemment, ce sont des lectures faciles, très bien adaptées si on a peu de temps à disposition et si on a envie de plonger dans un petit conte féérique le temps de quelques heures. Le côté rêveur qui se dégage de ces bouquins se voit bien sur la couverture et m'a donné envie de les lire (dans l'article Sur les pas d'Ondine: Mes lectures de maman (2014-2015), j'évoquais déjà Le sourire des femmes du même auteur)
Je considère la fiction comme ma première langue maternelle. Sans histoires dans ma vie, je me sens comme asphyxiĂ©e. J’en ai besoin comme d'une Ă©chappatoire, mais Ă©galement comme d'un canal d’expression unique, qui ne se rĂ©veille par aucun autre moyen: les histoires m'inspirent, Ă©veillent ma crĂ©ativitĂ©, me poussent Ă Ă©crire moi-mĂŞme, Ă puiser dans mon propre imaginaire. En faisant le fameux test de personnalitĂ© Myers-Briggs, j'ai dĂ©couvert que pour le type de personnalitĂ© qui me correspond (INFJ) la fiction reprĂ©sente un besoin vital...je le savais! mais oui! la lecture fait partie de moi. Et tant pis pour ceux qui ne le comprennent pas ou qui voient ce passe-temps comme une activitĂ© lĂ©gèrement asociale.
En ce qui concerne le choix de bons livres, je le prends très au sérieux depuis toujours. La boulimie de lecture va de pair chez moi avec une certaine rigueur: d'un côté, on peut avoir l'impression que je lis tout ce qui me tombe sous la main, d'un autre côté, le tri mental qui s'opère dans mon cerveau est très sélectif.
Il se trouve que depuis que je suis maman, je n'ai pas pour autant arrêté de lire, mais les moments consacrés à la lecture se font plus rares et plus précieux encore. Après la naissance de ma fille, la longue to do list de toutes les activités parmi lesquelles je choisissais jadis s'est drôlement réduite et, lorsque j'ai enfin un moment à moi, mon cerveau élimine par brassées des options qui désormais ne me semblent plus dignes d'attention ou de temps à y consacrer. Ainsi, lorsque j'ai une demi-heure à moi, et surtout depuis que je ne passe plus mon temps à ranger et à organiser (ayant pas mal désencombré notre maison et ma vie en général) mon choix se porte le plus souvent sur quelques pages d'un bon livre.
Le choix du bouquin dépend de plusieurs facteurs et mes envies, comme les envies de tout lecteur, peuvent varier d'un moment à l'autre et se modifier sur le long terme. Cependant, depuis mon enfance, j'ai l'impression qu'il y a un fil rouge dans mes attentes de lectrice et que certains critères se sont cristallisés clairement et de manière plutôt fiable. J'ai encore pu le constater en m'interrogeant sur quelques-unes de mes lectures récentes et en cours.
L'Ă©criture de l'auteur(e)
Si j'aime autant les livres, à la base, c'est parce que je suis une amoureuse des mots et des phrases. Il m'a toujours paru étrange de parler du style d'un auteur (même après 4 années d'études de lettres modernes je dois avouer que je ne suis toujours pas certaine de ce à quoi fait référence ce fameux mot style!) alors que le contenu et le contenant, le fond et la forme, pour moi, ce sont deux composantes qui se recoupent et s'entremêlent et qu'on ne peut jamais vraiment dissocier. Chez les bons écrivains, l'histoire d'un côté et les mots qui la racontent de l'autre forment un tout que personnellement, je me garde bien de disséquer.
J'affectionne les grands auteurs classiques chez qui cette harmonie parfaite entre la forme et le fond est une évidence. C'est une des raisons pour lesquelles je me tournerai toujours à nouveau vers les grands classiques de la littérature.
Or, comme je l'avais découvert dans mon article La littérature contemporaine ou comment revenir de ses préjugés, je peux trouver dans la littérature contemporaine également de quoi m'éblouir, même si je serai toujours particulièrement sélective. Je ne fais plus autant la différence entre un classique et un contemporain: Que je lise Marcel Proust ou Jonathan Franzen (dont j'ai commencé à lire le roman Purity récemment), j'ai toujours devant moi l'oeuvre d'un auteur, d'un vrai, cela se reconnaît dès les premières pages de lecture, toujours, et c'est tout ce qui fait mon bonheur de lectrice.
Une sortie des chemins tout tracés
Les romans de l'écrivaine ukrainienne Marina Lewycka font partie de cette catégorie de livres inclassables - leur premier mérite est que leur auteur a écrit les histoires qu'elle a voulu écrire, à sa manière, sans se soucier de ce qui est convenable. Depuis son premier roman A short history of tractors in ukrainian, je suis son oeuvre et jubile à la sortie de chaque nouveau roman. Autant j'apprécie la littérature classique, autant j'affectionne tout ce qui sort d'un carcan un peu trop resserré. J'aime les livres qui indirectement font l'éloge de la différence, de la marginalité (à la manière de la filmographie de Tim Burton) Qui véhiculent l'impératif, le besoin, de faire exactement ce qu'on veut, de la manière qu'on veut. Et on ressort de ces lectures en se disant qu'il n'y a vraiment que les limites qu'on se pose nous-mêmes.
C'est un point que j'apprécie en général dans la littérature russe - rien n'est trop grotesque ou trop fou pour pouvoir être transformé en précieux texte littéraire.
Souvent, d'ailleurs, dans ces livres uniques écrits par des écrivains incarnant la liberté créative la plus complète, la ligne qui sépare la réalité de la fiction est ténue, et cela me convient très bien: je suis une grande fan de l'auto-fiction, du fait de pouvoir piocher dans son vécu et d'en tirer ce qu'on veut, dans la liberté la plus totale.
La sagesse
Il y a de ces livres, plutôt orientés philosophie, psychologie ou encore développement personnel (Les quatre accords toltèques, Le Choix du bonheur...) ou encore des manuels de vie comme ceux de Marie Kondo (The Life-Changing magic of tidying up) qui m'ont enrichie tout en m'apportant plus de légèreté. Tous les livres autour de la question du traitement éthique des animaux (Eating Animals de Jonathan Safran Foer en est un exemple) font partie de cette catégorie de lecture. Je considère la pensée philosophique voire même spirituelle comme très importante et ainsi elle constitue une partie intégrante de mes choix de lecture, même lorsqu'il ne s'agit pas de fiction.
Récemment The Universe has your back a retenu mon attention: j'ai l'impression que parfois je tombe sur les bons livres au bon moment - à un stade de ma vie où la méditation et la recherche d'un lâcher-prise font partie de mes priorités, ce livre est tombé à pic.
J'aime aborder les sujets philosophiques ou spirituels avec une grande ouverture d'esprit: sans me cantonner au point de vue d'une religion ou d'une croyance en particulier, en restant à l'écoute et prête à la découverte, consciente que l'univers dans lequel je suis née renferme en son sein bien plus de mystères et de secrets que nous ne pouvons concevoir. J'aime les questions plus que les réponses, je trouve celles-ci bien plus humbles, et voilà donc un autre critère qui guide mes choix de lecture: continuer à poser les bonnes questions, à grandir, et à élargir mon horizon.
L'Ă©merveillement
Malgré tous les critères d'adulte qui se sont superposés à ceux de la lectrice que j'étais lorsque j'étais enfant, la place de l'émerveillement dans la lecture n'a pas bougé depuis. J'ai beau avoir fait des études, j'ai beau admirer les grands textes de la littérature classique, et faire preuve de snobisme (je l'avoue) devant toute une catégorie de lectures de plage que je boude systématiquement, je recherche finalement toujours le même frisson dont parle Emily Dickinson. Cet émerveillement est foncièrement le même aujourd'hui - jadis je lisais Secret Garden en me sentant complètement subjuguée, transportée dans un autre univers. Aujourd'hui je lis (finalement!) Peter Pan, je suis les aventures d'Harry Potter et je sens que dans le fond je suis restée la même lectrice: celle qui veut voyager à travers ses lectures, mais surtout être émerveillée.
On nous apprend depuis notre plus jeune âge que d’abord viennent les tâches, ensuite le jeu. Qu’il faut faire ses devoirs, accomplir des tâches mĂ©nagères, faire les courses…avant de pouvoir se consacrer Ă tout ce qui a trait Ă l’imagination. Au point d’oublier que l’imaginaire, c’est essentiel. Qu’elles soient vĂ©cues ou inventĂ©es, les histoires universelles telles que les contes de fĂ©e ne sont pas un luxe. On a besoin de romanesque dans nos vies, ce n’est pas optionnel.
Récemment, il m'arrive de plus en plus souvent (après plusieurs années passées à être trop sérieuse, trop centrée sur ma vie d'adulte, en somme) de ressentir combien il est essentiel de libérer son enfant intérieur, de laisser libre cours à son imagination, de s'occuper de son petit jardin secret, quel qu'il soit.
Il arrive qu'un nom de personnage ou qu'une couverture me donne envie de lire un livre (C'est le cas pour le roman représenté sur la photo ci-contre)
A ces moments-là , je mets de côté les à priori de snobisme littéraire et je fais ce que fait tout lecteur passionné: Je plonge la tête la première dans les premières pages, je me laisse emporter par la plume de l'auteur. Et heureusement mes instincts me trompent très rarement!